lundi 1 septembre 2014

Et si la France vendait la Joconde pour éponger ses dettes ?

Vendre des œuvres d’art pour renflouer ses caisses est devenu une alternative plausible pour les États endettés. En mettant en vente 85 toiles de l’artiste Miró, le Portugal, qui sort à peine d’une faillite, espère récupérer 36 millions d’euros.

Combien pour la Joconde ? Cette question pourrait choquer le sentimentaliste, attaché au patrimoine culturel français. Pourtant, une fois l’œuvre de Leonardo de Vinci vendue, Mona Lisa ne serait pas la seule à avoir le sourire.

"La valeur assurée la plus élevée de l’Histoire", selon le "Guinness World Records", qui l’avait évaluée à 100 millions de dollars, en 1962, soit avant sa tournée aux États-Unis. Le prix de la Joconde frôlerait aujourd’hui aisément le milliard d’euros. En attestent les touristes qui s’agglutinent au Louvre pour apercevoir la toile italienne, l’appareil photo à bout de bras qui mitraille au hasard.

Avec 2 000 milliards d’euros de dette, Bercy pourrait apprécier cette petite douceur en cette rentrée maussade (croissance en berne, chômage en hausse…). Et la Ville-Lumière, qui, avec ses 173 musées, détient l'un des patrimoines culturels les plus riches au monde, aurait largement de quoi sauver le pays.

À eux seuls, les chefs d’œuvre impressionnistes du musée d’Orsay épongeraient la dette de Paris, qui devrait avoisiner les 4 milliards d’ici fin 2014. Un scénario qui n’est toutefois pas à l’étude, souligne à "L’Express" Bruno Julliard, premier adjoint chargé des questions culturelles à la Marie de Paris. "Nous n’en sommes pas à ce point niveau économique", rappelle-t-il.

En France, seuls quelques frondeurs se sont risqués, au plus fort de la crise, à proposer la vente de la Joconde. Une idée qui revient au gré des prédictions alarmistes sur l’état des finances de l’Hexagone. Alors faut-il se délester de son patrimoine culturel pour alléger le poids de la dette ?

La loi française interdit la vente d’œuvres publiques

Ce n'est pas si simple : la loi française interdit de vendre les objets des musées publics. "Les biens constituant les collections des musées de France appartenant à une personne publique font partie de leur domaine public et sont, à ce titre, inaliénables", stipule l’article 451-5 du code du patrimoine.

Pour pouvoir vendre la Joconde, il faudrait donc changer la loi. Mais modifier la loi pourrait pousser les donateurs, principaux fournisseurs des musées, à s’opposer à toute vente, voire récupérer leurs biens. À cette hypothèse s’ajoute l’épineux problème des avantages fiscaux que représente le don d’un tableau.

En attendant, Paris se contente de vendre quelques uns de ses bijoux architecturaux. Bâtiments publics, résidences prestigieuses à l’étranger…et même ses vins les plus fins issus des caves de l’Élysée. Dernièrement, la France s'est séparée de son centre de conférence internationale du ministère des Affaires étrangères, à deux pas de la place de l’Étoile, devenu un palace qataro-chinois…

Le Portugal se sépare de ses Miró

Allemagne, Danemark, Pays-Bas, États-Unis... Plusieurs pays autorisent la vente d’œuvres d’art, sous certaines conditions. En avril 2013, Detroit, en faillite, avait par exemple décidé de mettre en vente la collection de son musée municipal. Des Van Gogh et des Picasso, estimés à plus de 11 milliards d'euros, assez pour rembourser la dette de la ville américaine.

De son côté, le Portugal est sur le point de céder sa collection de 85 œuvres de l'artiste espagnol Joan Miró, estimée à plus de 36 millions d’euros. Ainsi en a décidé, vendredi 29 août, la direction générale du patrimoine portugais, en se prononçant contre un classement, qui aurait rendu plus difficile la sortie des œuvres du territoire et leur vente aux enchères. Cette collection comprend notamment un des chefs-d'œuvre du peintre, "Femmes et oiseaux", évalué entre 4,8 et 8,4 millions d'euros. Christie’s a qualifié ces œuvres mises en vente d’"une des plus vastes et impressionnantes collections de l'artiste jamais mises aux enchères"

Censée renflouer l’État portugais en faillite, cette vente avait été reportée en février, puis annulée fin avril. Le tribunal administratif de Lisbonne avait alors décidé de bloquer la sortie du pays de la collection, dans le cadre d'une procédure en référé déclenchée par le ministère public "en défense du patrimoine culturel".

Les milieux culturels et l'opposition de gauche avaient dénoncé une "vente au rabais" du patrimoine du pays. La somme récoltée ne correspond toutefois qu’à une goutte d’eau face aux 210 milliards d’euros de la dette du pays.

Source: france24

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